Une journaliste yéménite à la rencontre des lycéens bordelais
De l’académie de Bordeaux à celle de Grenoble, Basma Nasser, journaliste et activiste yéménite, est allée à la rencontre de plusieurs classes de lycéens, à l’occasion de trois rencontres dans le cadre du programme de sensibilisation Renvoyé spécial, en partenariat, notamment, avec le CLEMI.
Crédit photo Lycée Gaspard Monge Chambéry. 2021.
Journaliste et activiste yéménite
Dès l’âge de 16 ans, Basma est consciente des inégalités dans son pays et de l’absence d’espace pour porter la voix des minorités. Elle s’engage auprès d’organisations pour défendre divers causes, dont la lutte contre le VIH. À l’Université, elle étudie le journalisme et la communication de masse et réalise l’importance de la liberté d’expression et à quelle point celle-ci est limitée au Yémen. Le pays est en guerre et les restrictions imposées par la charia s’accentuent avec des règles toujours plus dures, en particulier à l’égard des femmes. C’est à ce moment-là que la journaliste s’engage en faveur de la laïcité, un tabou dans la culture yéménite. Basma devient une cible, ses engagements la mettent en danger et sa famille aussi, elle décide alors de quitter son pays. Après un long parcours d’exil, elle arrive en France et intègre la Maison des journalistes en février 2020.
La journaliste yéménite @basmanasser_ s'est rendu au lycée Alfred-Kastler à #Bordeaux, pour témoigner de son parcours d'exil et de son combat pour la #Libertedexpression dans le cadre des rencontres #Renvoyéspécial programme de sensibilisation de la #MDJ @LeCLEMI @sudouest pic.twitter.com/j8V6ebcT6N
— MDJ – Maison des journalistes (@MDJournalistes) February 3, 2021
Crédit photo Lycée Gaspard Monge Chambéry. 2021.
Sensibiliser les jeunes à la liberté d’expression
Lorsqu’elle apprend l’existence du programme de sensibilisation de la MDJ, Renvoyé spécial, Basma est touchée par la démarche et propose immédiatement d’y participer. Le programme permet à différents publics, en particulier des jeunes (lycéens et jeunes sous protection judiciaire), de rencontrer des journalistes en exil, de découvrir leurs témoignages et leurs parcours, et d’échanger avec eux sur des sujets fondamentaux comme la liberté d’expression, la liberté de la presse ou encore la laïcité. Malheureusement sa première rencontre prévue a tout de suite été annulée à cause de la crise sanitaire qui a frappé la France, imposant le confinement dès mars 2020. Dès que les rencontres ont pu reprendre, la journaliste était parmi les premières à se présenter pour partir à la rencontre des jeunes ! Fin janvier 2021, la journaliste a été reçue au Lycée Gaspard Monge à Chambéry dans l’académie de Grenoble, où elle a échangé avec une classe de première. Deux heures durant, elle a pu témoigner de son parcours et débattre avec les élèves, curieux et attentifs. La session a été couverte par le journal local le Dauphiné Libéré.
Crédit photo Guillaume Bonnaud pour SUD OUEST. 2021.
Une petite lumière dans cette période grise
Début février, Basma Nasser a été accueilli au Lycée Alfred Kastler à Bordeaux. Cette fois-ci, la journaliste a rencontré une centaine d’élèves et d’étudiants sur deux jours : trois classes de secondes professionnels en spécialité industriel (TCI : technicien chaudronnerie industrielle, TU : technicien d’usinage et SN : système numérique), des secondes général et quelques jeunes de BTS en alternance spécialité chaudronnerie. Pour l’occasion, un professeur de lettres anglaises d’origine tunisienne s’est mobilisé pour assurer la traduction de l’arabe au français. Une journaliste du journal Sud Ouest avait fait le déplacement pour l’occasion. Pour le professeur documentaliste chargé de l’organisation de la rencontre au lycée, c’est un soulagement que la session ait pu se maintenir malgré la crise sanitaire : “Pour tout le monde c’est une très belle expérience. On était dans quelque chose de très émouvant et très concret. Voir quelqu’un qui incarne les sujets d’études c’est précieux, ça parle vraiment aux jeunes. C’est une petite lumière dans cette période grise. ”.
Un message de liberté qui rayonne au delà des lycées
De nombreux sujets ont été abordés concernant le Yémen, les privations de liberté et injustices que subissent la population et les femmes en particulier. Les crimes d’honneur notamment sont un fléau permettant des féminicides violents au sein même des familles, perpétués par les proches pour restaurer l’honneur de la famille suite à d’éventuels outrages, punissant les coupables mais aussi les victimes. Ces sujets, ont beaucoup touchés les jeunes, indignés contre le racisme systématique à l’encontre des personnes de couleur, la situation des femmes vivant dans un pays appliquant les lois de la charia, les mariages forcés de mineurs, l’esclavagisme, l’absence de droit pour les minorités notamment religieuses, ou encore la peine de mort pour les personnes LGBTQI+. Les élèves, très surpris, ont beaucoup réagi et un bel élan de solidarité s’est créé. À Bordeaux, l’un des parents d’élèves, conseiller municipal, délégué à la lutte contre les discriminations, à Mérignac, a même écrit un mot de soutien à la journaliste lui proposant son aide pour faire passer son message et son combat pour la liberté d’expression et des droits humains, combat de tous et de tous les jours.