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Par le blog Valentinepuaux, publié le 25 octobre 2015

 

Après 22 jours de péril et 4 pays traversés pour quitter Kaboul, Sayed, journaliste afghan a trouvé refuge à la Maison des journalistes, à Paris. Il nous livre un récit plein d’espoir quant à l’avenir de sa profession dans la capitale.

6000 euros pour payer un passeur et peu de temps pour quitter Kaboul sous l’emprise des talibans ; c’est comme si c’était la veille pour Sayed*, arrivé à Paris il y à quelques semaines. Avec son visage décontracté mais des épaules voûtées et une voix mal assurée, ce reporter pourrait simplement paraître fatigué du voyage mais a mis 22 jours pour traverser les frontières de la Turquie, de l’Iran, de la Grèce et de l’Italie, sans papiers. Tout un périple pour fuir un monde despotique, contrôlé par des « fanatiques religieux » qui menacent les radios locales*, à la moindre critique.

« Un soir de 2012 j’ai pris l’antenne pour prévenir les gens. J’étais le seul à savoir qu’il y aurait une seconde attaque dans le centre commercial. », expliquera-il avec les yeux qui pétillent.

Logé depuis peu à la Maison des journalistes qui soutient les expatriés, dans le 15ème arrondissement, cet aventurier a néanmoins su faire face à ses mauvais souvenirs. Il a retrouvé un climat de confiance pour écrire. Et c’est entre les murs du centre, ou résonnent les voix et les pas des résidents, qu’il nous livre un récit plein d’espoir, en anglais.

Défenseur des libertés, reporter mais aussi auteur d’un livre polémiqué, le jeune afghan a risqué sa vie pour déjouer les plans des talibans et réveiller les consciences du peuple mais ni la peur, ni la guerre , ni les cauchemars ne l’ont pas empêché de croire en ses rêves.
Pourtant, dans une situation précaire ou tout peut changer du jour au lendemain, Sayed reste étrangement optimiste pour la suite de sa carrière. Journaliste culturel depuis près de 8 ans, il a toujours le goût des mots et compte profiter des opportunités professionnelles de la capitale.

« En France, il y à beaucoup d’opportunités mais si je retourne au pays, je risque ma vie. S’ils vous connaissent ils vous poursuivent. », dit-il avec une crispation dans la voix.

Sans papiers et sans autorisation de travailler, Sayed cherche donc un moyen de s’occuper l’esprit, de se cultiver et de rencontrer des futurs collègues parce qu’il attend des réponses de l’OFPRA.

« J’ai des copies d’articles que j’ai écrit quand j’étais là-bas. Ils ne sont pas sur internet mais j’ai des photos. Et puis j’ai été professeur à l’Université de Korshid, à Kaboul. J’espère qu’ils accepteront ça. », déclare-il en scrutant la pièce, comme à la recherche d’une idée invisible pour prouver sa bonne foi.

Aussi, malgré sa bonne humeur, son besoin de communiquer et son opiniâtreté, s’intégrer dans la ville n’est pas facile. Il parle bien l’anglais, s’exprime facilement mais avoue souffrir de solitude, loin de sa femme qui réside en Angleterre.
« J’ai remarqué que les gens sortent boire un verre avec leurs collègues, moi je n’ai personne. Ma femme me rejoint le temps d’un week-end mais c’est difficile de tenir… »

Mais là encore, la lumière brille dans l’obscurité. L’amoureux des lettres, s’est lancé dans un nouveau projet de longue haleine. « J’écris un roman. Un roman qui ne parle pas de mon histoire mais une fiction qui parle de pays riches. »

Alors si pour cet expatrié, l’aventure n’est pas encore terminée mais que sa traversée fut longue, dangereuse et hasardeuse, il a compris qu’avec du courage et de la force d’esprit, le journalisme était un métier de passion et que l’on pouvait traverser le pire.

* Pour des raisons de sécurité, ni le nom de famille, ni la radio ne seront citées.

* L’office français pour la protection des réfugiés et des apatrides.

 

Vendredi 6 novembre 2015 visite-découverte à la MDJ de 60 étudiants accompagnés de leur professeur Stany LARDEUR, de l’Institut universitaire de technologie du Littoral Côte d’Opale, site de Saint-Omer, Département Gestion Administrative et Commerciale des Organisations de Longuenesse.

Rencontre-échange avec les journalistes Gulasal KAMOLOVA (Ouzbékistan) et Mortaza BEHBOUDI (Afghanistan).

Intervention de Darline Cothière

Intervention de Darline Cothière

A l’occasion de la Journée mondiale de la Paix, le lundi 21 septembre 2015, Behzad QAYOMZADA, journaliste afghan ancien résident de la MDJ, a organisé une conférence intitulée « Connaître le commandant Massoud » dans la salle La Scam de la Maison des journalistes. Ci-dessous, la programmation de l’événement, qui a été ouvert par un mot d’accueil de la directrice de la MDJ, Darline Cothière.

Projection du film sur le Commandant Massoud
Intervention de M. Sadegh HAMZEH, journaliste Iranien de la MDJ
Intervention de Mme Ania WINKLER, photographe et réalisatrice
Musique française sur Massoud
Intervention de Dr Massouda QADIRI, Activiste Afghan
Intervention de M Pascal CHARRIER, Professeur d’école
Projection du Film sur le Commandant Massoud réalisé par Reza
Intervention de Mme Shoukria HAIDAR, Activiste afghane
Intervention de Mme Françoise CAUSSE, Journaliste française
Intervention de Mme Hélène SURGERS, Écrivaine
Intervention d’un caricaturiste iranien de la MDJ

Ci-dessous la biographie du Commandant Massoud et la galerie photo de l’evenement (crédits photo : Lisa Viola Rossi / MDJ).

Dessin d'Ali JAMSHIDIFAR

Dessin d’Ali JAMSHIDIFAR

Ahmed Chah Massoud, dit le commandant Massoud, est né en 1953 dans le village de Djangalak, dans la vallée du Pandjchir en Afghanistan, fils d’un officier supérieur de la monarchie afghane. Il appartient à l’ethnie Tadjik. Il a suivi ses études au lycée français Isteqlal de Kaboul, où il a appris le français, avant de faire des études d’ingénieur du génie civil à l’École polytechnique de Kaboul.Convaincu de la nécessité de s’opposer aux ingérences des puissances étrangères à son pays et d’en préserver l’identité, il rejoint la résistance et la clandestinité en 1973, dès le coup d’État fomenté par le prince Mohammed Daoud Khan. Pendant cinq années, il fait le coup de feu en compagnie d’une petite centaine d’hommes, armés de fusils datant du début du siècle.Les communistes prennent officiellement le pouvoir en 1978. En 1984, au plus fort de la guerre contre les troupes soviétiques, Ahmed Chah Massoud crée et prend la tête du « Conseil de surveillance ». Ce conseil va vite devenir le véritable centre politique de tout le nord de l’Afghanistan : au total, son influence s’étend sur 15 des 29 provinces afghanes, avec des attributions très larges comprenant : affaires politiques, administratives et militaires. Massoud est un tacticien et un stratège hors pair, le seul chef de la Résistance à avoir jamais réussi à imposer une trêve avec l’Armée rouge en échange de son retrait. Il négociait alors directement avec Iouri Andropov, un des plus fameux directeurs du KGB et Secrétaire général du Comité central du Parti communiste de l’Union soviétique entre novembre 1982 et février 1984. Son intégrité sera reconnue de la part de ses ennemis. Durant les années 1980, son action résistante héroïque est secrètement financée par l’Opération Cyclone de la CIA.

Indépendant et opposé aux extrémistes religieux ou politiques, il a toujours eu des relations tumultueuses avec les Pakistanais, les Américains, les Saoudiens, tout comme avec les tendances pro-iraniennes ou pro-saoudiennes de son propre parti, le Djamiat-Islami. À la différence des Britanniques et des Français, les Américains ne lui faisaient pas confiance : Particulièrement à cause de sa capacité à négocier (en 1984 avec Andropov directement) et aussi de son incapacité à comprendre et surtout à parler la langue anglaise. Ils ne lui envoyèrent donc que très peu de missiles FIM-92 Stringers, qui auraient été des armes déterminantes pour sa résistance. Malgré tout, la situation géographique de la vallée du Pandjshir, véritable forteresse naturelle, alliée à l’habileté et à la débrouillardise des Combattants sur le Chemin de Dieu [« Mudjahiddhin »] leurs permettant d’utiliser les prises de guerre, permettra à Massoud de fissurer le Mur de Berlin et de résister à l’obscurantisme des Taliban.

Le 2 juillet 2000, il reçoit une délégation de femmes dans la vallée du Pandjshir et signe la Charte des droits fondamentaux de la femme afghane. Le Commandant Massoud a été invité en avril 2001 au Parlement européen de Strasbourg, à l’initiative de Nicole Fontaine, alors Présidente du Parlement. Il y a dénoncé les ingérences étrangères et sollicité une aide financière pour répondre aux nécessités des familles fuyant le régime Taliban et réfugiées dans la vallée du Pandjshir. Il ne verra pas l’arrivée de cette aide promise.

Rencontre avec le journaliste Behzad QAYOMZADA (Afghanistan) au Lycée polyvalent Marguerite Yourcenar / Beuvry (Lille / Nord-Pas de Calais), vendredi 27 mars 2015.

 

Parmi les journalistes interviewés : Behzad Qauom Zada (Afghanistan), Rana Zeid et Muzaffar Salman (Syrie).