Salle comble, temoinages émouvants …, la soirée événement des 20 ans de la Maison des journalistes était une réussite !
Merci à Franceinfo et tous ceux et toutes celles qui ont fait le déplacement.
Sur la scène du studio 104, les témoignages de journalistes ukrainiens, russes, afghans, syriens et bien d’autres encore, se sont succédés, avec la participation exceptionnelle de CharlElie Couture et Capitaine Alexandre et ses accompagnateurs Caroline Bentz et Alain Larribet.
Darline Cothière, directrice de la MDJ, a pu exposer les projets et les perspectives d’avenir de cette unique association, notamment la création d’un réseau Maison des journalistes à travers le monde.
« La Maison des Journalistes, c’est plus qu’un toit, c’est aussi la possibilité d’écrire“ Beraat Gokkus
D’après Beraat, ancien résident de la MDJ, avoir une chambre est vitale pour survivre, mais le plus important pour un journaliste, est d’écrire et de retrouver sa peau de journaliste. À la Maison des journalistes, il peut enfin se concentrer sur l’écriture grâce à l’Œil de la MDJ, journal en ligne de la MDJ, il retrouve alors sa raison d’être. Le journaliste turc s’exprime également sur la situation alarmante des journalistes en Turquie.
Ghys Fortuné, journaliste congolais et ancien résident de la MDJ rejoint les dits de son confrère Beraat Gokkus “Arriver dans un pays où l’on n’est plus rien du tout – personne ne vous connaît, vous ne parlez pas la langue, vous n’avez pas les codes – les amis, la famille, la maison laissés derrière, c’est traumatisant, mais surtout dévalorisant”. Ghys et Élise (journaliste burundaise) ont fait de la prison dans leur pays, simplement du fait d’écrits ou de reportages qui déplaisait au régime.
Élise est persuadée d’avoir échappé à la mort. Prévenue qu’on venait l’enlever pour la tuer, elle a juste eu le temps de prendre ses deux enfants, de tout laisser et de se cacher dans les faubourgs de Bujumbura. Elle organise sa fuite, confie ses enfants à des amis, et arrive à Paris. Elle y apprendra que son collègue et ami, Jean Bigirimana, a été arrêté par les services de renseignement burundais, et on ne l’a plus jamais revu. C’était il y a six ans
“En cinq minutes, j’ai réuni mes affaires les plus importantes, les ai jetées dans une valise et ai refermé la porte de mon grand appartement à Kaboul”, le 15 août 2021, Najiba Noori, journaliste afghane, qui travaille à l’AFP de Kaboul, quitte le bureau et tombe sur les Talibans qui ont pris le contrôle de la rue. Elle n’hésitera pas. Elle se glissera dans le flux grossissant des Afghans qui fuient vers l’aéroport. Être femme et journaliste sous les Talibans, c’était la répression assurée, voire plus.
Les mois qui suivent en Afghanistan lui donneront raison, les femmes voient leurs espaces se réduire, et faire du journalisme est dangereux pour elles.
Najiba Noori et Hafiz Ahmad Miakhel (Afghanistan). Alberic De Gouville, président de la MDJ, Ghys Fortuné bemba Dombe (Congo Brazaville) et Elyse Ngabire (Burundi).
“Ce n’est pas facile pour nous, les journalistes réfugiés, et c’est très difficile de trouver un travail au sein d’un média français” Najiba Noori
La presse française est solidaire auprès de ces exilés de l’information, mais il n’est pas évident de leur offrir un travail, il faut des autorisations. Comme le témoigne Hanna, journaliste biélorusse qui souhaite travailler ici en France, mais n’a pas le document qui lui permettrait de postuler à un emploi rémunéré, aidée par la MDJ et Reporters sans Frontières dans ses démarches auprès de la préfecture, elle veut garder l’espoir.
Hanna a fui Moscou en mars dernier. Le parlement russe, par son vote du 4 mars, lui a interdit toute pratique journalistique, et puis il y a les menaces qu’elle évoque à demi-mot sur lesquelles il ne sert à rien de s’appesantir.
Sur la scène du 104, elle parle à côté de Nadiia, une journaliste ukrainienne venue témoigner. Sa radio de Kiev a cessé d’émettre, elle a quitté son appartement, les bombardements en pleine nuit, elle est arrivée à Paris.
© Dominique Le Brun
Revue de presse
Évènement : vivez les 20 ans de la Maison Des Journalistes, mercredi 14 septembre à Paris
La Maison des journalistes fête 20 ans de soutien aux exilés de l’information
Traduction Rim Benomar
Invitée à La Maison des journalistes à l’occasion de son exposition photo « Portrait(s) d’une Résistance », Justyna Mielnikiewicz, photographe polonaise installée à Tbilissi (Géorgie) a été interviewée par Manar Rachwani, Journaliste syrien actuellement résident de La MDJ.
M.R : Généralement, les gens admirent les photos, mais s’intéressent peu à la personne derrière l’objectif. Selon vous, quelle est la différence entre un photojournaliste et un journaliste, et comment pourriez-vous décrire votre expérience en tant que photographe de guerre ?
J.M : La photographie est un outil de communication dont disposent les journalistes, à travers lequel ils peuvent transmettre au monde des fragments de nos réalités. J’ai capturé ces cinq dernières années l’évolution de l’invasion russe et ses conséquences sur la vie quotidienne du peuple ukrainien. C’était important pour moi de dévoiler la réalité d’une vie en guerre et de raconter l’histoire d’une résistance qui dure depuis 2014. J’ai vécu sous l’ombre de l’invasion russe en Géorgie et notamment en Ukraine. Ma motivation pour documenter la guerre est surtout personnelle avant d’être professionnelle. Je raconte tout simplement les difficultés des deux pays qui m’ont accueillie. Je considère que la technologie permet de faciliter la communication dans le monde, ma mission est de donner une voix à l’Ukraine et la Géorgie. Ces deux pays manquent de moyens nécessaires pour transmettre leurs propres messages. Depuis le début de l’invasion russe, de nombreuses fausses informations sur l’Ukraine ont été diffusées sur internet. La Russie a le pouvoir d’orchestrer de diverses campagnes de désinformation sur la guerre en Ukraine. En tant que photographe, je désire partager la vérité.
M.R : On parle souvent de l’objectivité et surtout de l’obligation de neutralité en journalisme. Selon vous, est-ce que chaque journaliste doit disposer d’un message particulier à transmettre ?
J.M : En tant que journalistes, l’objectivité est un outil que nous devons appliquer et respecter dans nos recherches. Il faut partager l’information sans faire intervenir des préférences personnelles. C’est à nous de restaurer la crédibilité des médias, et dévoiler les vérités. Toutefois, il est difficile d’atteindre l’objectivité dans certaines situations, surtout face à des événements monstrueux.
M.R : Que représente pour vous cette exposition de vos portraits à la Maison des journalistes ?
J.M : Voir mes portraits tirés en grand format et exposés sur la façade de la MDJ me fait très plaisir, cela les rend beaucoup plus accessibles, en effet, les passants s’arrêtent et peuvent découvrir les photographies directement, contrairement aux galeries. De plus, j’admire beaucoup le travail de cette structure qui défend les journalistes menacés. La France se mobilise beaucoup plus que la Géorgie et l’Ukraine pour les journalistes.
M.R : Les photos affichées sur la façade de la MDJ ne sont qu’une petite partie des portraits que vous avez pris lors de votre déplacement en Ukraine. Quelle est la particularité de ces photos et est-ce qu’elles montrent les différents aspects de la guerre ?
J.M : La guerre n’est qu’une partie de la vie parmi tant d’autres, et elle n’empêche pas les habitants du pays de pratiquer leurs activités et d’assurer les responsabilités quotidiennes : faire les courses, emmener les enfants à l’école, etc.. Ces aspects de la vie, certes, impactés par la guerre, continuent d’exister.
Le but de ces photographies est de montrer que la vie de ces femmes et ces hommes continue malgré la pression du conflit, afin que chacun puisse s’identifier dans leur quotidien et de se retrouver dans leur histoire.
Dans mon travail, j’essaye de mettre en avant la résistance de tous ces gens ordinaires face à cette guerre qu’ils sont en train de subir, et essentiellement les femmes, afin de déconstruire les idées reçues et démontrer que la guerre n’est pas qu’une affaire d’hommes.
M.R : En tant que photographe qui documente la vie en Ukraine depuis 2014, est-ce que vous étiez surprise par la résistance Ukrainienne, ou vous vous y attendiez ?
J.M : En 2014, un grand nombre d’Ukrainiens s’est porté volontaire dans l’armée et l’État ne pouvait pas fournir l’équipement à tout le monde. Donc les Ukrainiens ont organisé plusieurs campagnes de collecte de fonds afin de se procurer des armes, des gilets de sauvetage et des médicaments. C’est en restant unis qu’ils ont réussi à résister face à l’invasion russe. Actuellement, l’armée de l’Ukraine est mieux équipée et mieux gérée, mais les Ukrainiens continuent à faire des dons et d’aider de toutes les manières possibles. Par exemple, une de mes amies a perdu son compagnon durant le conflit de 2014. Suite à ce drame, elle a décidé de travailler dans le bureau des personnes disparues à Dnipro en tant que bénévole en parallèle de son travail à l’Université. Quand la guerre a éclaté en 2022, elle a commencé à récolter les dons pour les réfugiés et à préparer les médicaments pour les soldats. Les gens qui sont bien informés sur la situation de l’Ukraine, savent très bien que les Ukrainiens ont toujours résisté face à l’occupant russe.
M.R : Est-ce que vous avez peur que le monde commence à oublier la guerre en Ukraine et à négliger la souffrance du peuple Ukrainien ?
J.M : Je pense que c’est un souci qui vient avec chaque guerre. Les guerres en Syrie et Afghanistan ont été oubliées au moment du déclenchement de la guerre en Ukraine. J’espère que le monde n’oubliera pas l’Ukraine et que le peuple ukrainien continuera à écrire son histoire.
« Portrait(s) d’une Résistance – Ukraine 2004-2022 » est une exposition de photographies de la photographe-documentaire Justyna Mielnikiewitcz, mise en place par la Maison des journalistes en partenariat avec L’Institut polonais de Paris, le Centre Culturel Ukrainine et la communauté des bellaruss à paris
Justyna Mielnikiewicz, photographe polonaise, vit à Tbilissi, en Géorgie, depuis 2003. Ses travaux ont été publiés dans le monde entier entre autres par le New York Times, Newsweek, Le Monde, Stern et National Geographic. Elle a été lauréate du World Press Photo, de la Bourse Canon de la Femme Photojournaliste , du prix du jeune photographe du Caucase de la Fondation Magnum, de l’Aftermath Project Grant et du Eugene Smith Fund. La plus grande partie de son travail est consacrée à des projets personnels de long terme, publiés sous forme de livres: Woman with a MonkeyCaucasus in Short Notes and Photographs (2014), Ukraine Runs Through it (2019). Ce dernier a été présélectionné parmi les 20 meilleurs livres par Paris Photo et Aperture. Justyna Mielnikiewicz est représentée par l’agence MAPS
© Elyaas Ehsas
Revue de presse
« Photographie : la résistance ukrainienne dans l’objectif de Justyna Mielnikiewicz », La Croix
« Exposition « Portrait(S) D’une Résistance – Ukraine 2004-2022 » À Paris XV », Carnets de Week-end
« UKRAINE : UNE EXPO PHOTO À LA MAISON DES JOURNALISTES », Sgen-CFDT
« Portrait(s) d’une ukrainienne sur les grilles de l’Hôtel de Ville », Mairie de Paris
« Portrait(s) d’une résistance ukrainienne sur les grilles de l’Hôtel de Ville », Sortir à Paris
« Une exposition pour rendre hommage aux reporters de guerre en Ukraine », France 24, reportage
« Portrait(s) d’une résistance en Ukraine », TV5 monde