Pour la première fois, la MDJ s’est rendue à la CCIJP (Commission de la Carte d’identité des Journalistes Professionnels). Mercredi 14 février, une délégation de journalistes exilés d’Algérie, de Syrie, d’Afghanistan, d’Irak, du Kazakhstan, d’Ukraine et d’Iran, accompagnée de Lisa Viola ROSSI, chargée de communication et de sensibilisation, de Margot FELLMANN, volontaire en Service Civique et de Pierre DASSIE, stagiaire de 3ème de la MDJ, a été accueillie à la commission par monsieur Claude CORDIER, président, et madame Marjorie MORVILLE, assistante de direction de la CCIJP. 

La délégation de la MDJ est accueillie à la CCIJP par le président Claude CORDIER le 14 février 2018 Photo © MDJ

Cette visite a commencé par une présentation de la CCIJP assurée par le président de commission Claude CORDIER.

La carte de presse est un outil de travail. Elle est une protection car on ne peut pas envoyer une personne dans un milieu a risque sans. Elle sert aussi à couvrir des événements sportifs, culturels, judiciaires, etc. Le président a notamment expliqué les différentes étapes à respecter pour être bénéficiaire de la carte de presse et ainsi obtenir le statut de journaliste professionnel. Ce statut est inscrit dans la loi afin de le protéger.

Extrait de la loi BRACHARD de 1935 :
Article L 7111-3 du code du travail : « Est journaliste professionnel toute personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée, l’exercice de sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques ou agences de presse, et qui en tire le principal de ses ressources. »

Pour pouvoir posséder le titre de journaliste professionnel, il y a donc certaines règles à respecter. Le journaliste doit gagner majoritairement sa vie grâce à son activité journalistique. Par exemple, s’il exerce deux métiers, son travail de journaliste doit lui rapporter plus d’argent et lui prendre plus de temps que son second emploi. De plus, le statut de journaliste professionnel est impossible dans certains cas, si on est fonctionnaire par exemple. Le montant minimum de revenus journalistiques est fixé à 630€ par mois pendant au moins trois mois. Enfin, monsieur CORDIER a insisté sur le fait que la carte de presse peut être accordée à des journalistes étrangers seulement s’ils dépendent du droit français, c’est-à-dire d’un organe de presse français.

Face à un refus de la CCIJP, le demandeur peut faire appel. S’il n’est toujours pas satisfait de la décision, il a l’occasion de se défendre devant la commission plénière constituée, entre autres, de magistrats. Il peut effectuer de nouveaux recours devant le tribunal administratif puis le Conseil d’État, ce qui représente en tout cinq niveaux.

De 2006 à 2016, une baisse du nombre de cartes attribuées a été observée. Aujourd’hui, on ne compte plus que 35 O47 bénéficiaires contre 37 009 dix ans auparavant. Parmi eux, 53% sont des hommes et 47% des femmes. Autre chiffre éloquent, 50% des cartes en France sont délivrées à des journalistes de la presse spécialisée (jardinage, mode, culture,jeux vidéo, etc.) ou la presse professionnel. Monsieur CORDIER observe d’ailleurs que contrairement à la presse nationale et généraliste, ce sont ces médias qui recrutent et créent des emplois. Il existe à ce jour peu d’études statistiques sur les chiffres de la CCIJP, mais à partir de l’année prochaine les demandes pourront s’effectuer en ligne ce qui simplifiera l’exploitation de ces résultats, et donc une meilleur compréhension de secteur journalistique français.

La visite a continué avec un temps d’échange. Monsieur CORDIER a été curieux de connaitre le fonctionnement de l’obtention de la carte de presse dans les pays d’origine des journalistes en exil présents. Dans certains cas, le processus est bien plus facile qu’en France. Pour la plupart d’entre eux cela dépend uniquement des syndicats. La France, elle, a décidé de créer une commission paritaire. Nommés pour trois ans par les fédérations patronales, les commissaires employeurs représentent toutes les formes de presse : écrite, d’agence, audiovisuelle, magazine, etc. Face à eux, les commissaires journalistes sont élus pour trois ans également, sur base de listes syndicales. Ces commissaires exercent parallèlement une activité professionnelle journalistique.

Monsieur CORDIER a ensuite guidé le groupe dans les locaux de la commission. Après avoir rencontré le personnel, les journalistes ont visité les archives. Un large sous-sol où sont disséminés des milliers de documents, dont certains datent même du lendemain de la Seconde Guerre mondiale.

Cette visite s’inscrit dans le cadre des activités culturelles organisées par la Maison des journalistes grâce à la précieuse collaboration d’un réseau de partenaires solidaires – notamment des institutions culturelles de Paris et d’Île de France – développé depuis quelques années par le Service Culture de la MDJ.

Le mardi 13 février 2018, Monsieur Mohmed AL ASBATT, journaliste soudanais et ancien résident de la MDJ, est intervenu dans le cadre de l’opération Renvoyé Spécial au lycée Jean Moulin de Revin dans l’académie de Reims.

Le professionnel de l’information a témoigné de son parcours d’exilé auprès des lycéens. Journaliste d’origine soudanaise, Mohmed AL ASBAT est diplômé de l’école de droit de l’Université EL NEELAIN à Khartoum. Il a travaillé par la suite en tant que journaliste et éditeur pour de nombreux journaux de sa région, en se rapprochant progressivement de sujets politiques pour évoquer les conflits de son pays. M. AL ASBAT est d’ailleurs secrétaire de l’Union des écrivains soudanais et membre du secrétariat du Réseau des journalistes soudanais.

Photo © Ludovic Pflier

Revue de presse :

Lycee Jean Moulin de Révin, Rencontre avec le journaliste exilé Mohmed AL ASBATT

 

Le mardi 13 février, de 10h à 12h, le journaliste camerounais Remy NGONO, accompagné de Lisa Viola ROSSI, chargée de communication et de sensibilisation, Margot FELLMANN, volontaire en Service Civique, et Pierre DASSIE, stagiaire, a été accueilli au lycée des métiers Nicolas Louis Vauquelin pour le programme de sensibilisation Renvoyé Spécial organisé par la MDJ.

Monsieur NGONO a rencontré une trentaine d’élèves de BTS Pilotage des Procédés et de la classe d’accueil UPE2A. Pour lui souhaiter la bienvenue mesdames Louisa MAZOUZ, proviseure, et Catherine AZOULAY, proviseure adjointe, se tenaient aux côtés des professeures :  Sarah MEYER, Jeanne MAROT et Virginie BONNEFONT. Enfin, Marianne ACQUAVIVA, représentante du CLEMI, partenaire de la MDJ, et Pauline CLAUDE, médiatrice culturelle Arcadi, ont également assisté à la rencontre.

Cette intervention se déroulait dans le cadre de Renvoyé Spécial Île-de-France qui met en avant des journalistes-écrivains afin qu’ils partagent leur expérience de professionnels de l’information mais aussi d’auteurs. Renvoyé Spécial est organisé en partenariat avec le CLEMI et Presstalis.

Le journaliste camerounais Remy NGONO entouré des jeunes du lycée Vauquelin de Paris Photo © Margot Fellmann

Monsieur NGONO (ancien journaliste pour la chaîne d’état camerounaise CRTV, puis directeur et animateur de la Radio Télévision Siantou) a commencé par raconter l’histoire du Cameroun. Colonisé par la France jusqu’en 1960 et le Royaume-Uni jusqu’en 1961, il a connu le même dirigeant, Paul BIYA, premier ministre de 1975 à 1982 puis président de 1982 à aujourd’hui, soit 43 ans au pouvoir. La France pendant ce temps-là a connu 5 dirigeants. Le Cameroun a été élu deux fois le pays le plus corrompu au monde par Transparency International, sa presse diffuse de la propagande et chaque matin chante des chansons honorifiques.

Le journaliste a ensuite témoigné de ses raisons pour partir en exil : le 5 août 2003, Monsieur NGONO a été arrêté alors qu’il était avec son fils, et a écopé de 6 mois de prison. Les policiers l’ont déshabillé de force, toujours devant son fils, au commissariat, puis ils l’ont enfermé dans la prison Kondengui à Yaoundé. Dans cette prison, il existe plusieurs quartiers, en fonction du délit commis. Le journaliste s’est retrouvé enfermé au Kosovo, quartier des terroristes, l’hygiène y est déplorable, les prisonniers ne mangent qu’une fois par jour à 11 heures, une portion de riz grande comme un demi verre d’eau. N’ayant que 700 places de libre, le Kosovo accueille 2400 personnes, les prisonniers morts sont laissés pour compte avant d’être envoyé dans la chaufferie. Là, ils sont abandonnés aux rats et aux insectes. Quand la mort frappe finalement, ils sont entassés dans des fosses communes.

Six mois plus tard, le journaliste est libéré. Les autorités lui demandent de s’excuser publiquement : il refuse et pour ne pas revivre l’enfer de la prison, il décide alors de prendre la route de l’exil.

Devant lui, dans la classe du lycée Vauquelin il y a beaucoup de nationalités représentées. Certains viennent de Tunisie, Chine, Salvador, Mali, Côte d’Ivoire, Arménie, Lituanie, Cuba ou encore de Mauritanie. Les élèves ont posé des questions sur sa vie et son exil, ses ressentis et ses sentiments. Remy NGONO a conclu : « Je veux laisser un message pour la jeunesse. Pour la postérité. J’aurais pu laisser une voiture ou de l’argent, mais les idées sont bien meilleures ».

La rencontre s’est conclue par un présent de la part des élèves. Ils ont fabriqué du savon de différentes couleurs à l’effigie de Renvoyé Spécial. Un joli souvenir apprécié par le journaliste et l’équipe de la MDJ.

 

Réactions des élèves :

Les jeunes de l’unité pédagogique pour élèves allophones arrivants (UPE2A) ont répondu par écrit à plusieurs questions après la rencontre. Un exercice difficile pour eux qui découvrent la langue française, mais aussi car parfois le témoignage du journaliste en exil fait appel à leur propre histoire.

« Si je veux devenir journaliste, ce témoignage me servira car j’ai compris beaucoup de choses sur ce métier. »

« J’ai appris beaucoup de choses sur le Cameroun mais j’ai surtout été marqué par la violence envers les journalistes. »

« pour moi abandonner son pays et être contraint à l’exil est une chose horrible. »

« J’ai été marqué par l’histoire de cette femme venue accoucher dans un hôpital mais qui est morte car le médecin a refusé de l’aider à cause de l’argent. »

« Pour un gouvernement dictatorial, les journalistes ont forcément tort car il ne veut pas dire la vérité sur la situation du pays. »

« J’ai peur pour les journalistes car ce travail est très risqué. »

« Le rôle d’un journaliste dans la société d’aujourd’hui est d’être un témoin. »

Revue de presse : à venir

Le mardi 13 férvrier 2018, Hani ALZEITANI, journaliste syrien est parti à la rencontre des élèves du lycée Alexandre Dumas de Cavaillon dans l’académie de Aix-Marseille. Cette rencontre était l’occasion pour la trentaine de lycéens de Terminal Bac Pro, accompagnés de leurs professeures Fabienne APPY et Natalie FABRE, d’échanger avec monsieur Hani ALZEITANI sur les valeurs fondamentales de la liberté d’expression, de la liberté de la presse mais également sur la douleur de l’exil. La rencontre a été traduite par le professeur Monsieur BEL HADI.

Le journaliste syrien Hani ALZEITANI en exil entouré des élèves du lycée de Cavaillon le 13 février

Les professeures se sont dites ravies de cette rencontre : « Nous avons été très contentes de le recevoir, les élèves ont été très touchés par le témoignage de M. Alzeitani. Merci pour ce moment intense en émotions. » De fait, les commentaires des élèves rédigés après cette rencontre montrent à quel point le témoignage de ce journaliste qui a vécu la prison et la torture en Syrie, puis l’exil, a marqué les jeunes :

« C’était une rencontre très émouvante. Cela nous a fait prendre compte que tous les jours, des personnes se battent pour la liberté d’expression. Des gens quittent leur famille, sont emprisonnés et même torturés pour que plus tard leur pays ait la possibilité de s’exprimer librement. »

« M. Alzeitani nous a fait découvrir les conditions de vie en Syrie. Cela nous a touché. C’est un homme très courageux. »

« Lors de cette rencontre, j’ai compris beaucoup de choses, la valeur de la vie. J’ai appris aussi sur les difficultés à être journaliste dans un pays sans liberté. »

« Mille mercis d’avoir partagé votre histoire avec nous. Bon courage ! »

« Le rôle d’un journaliste est de dire la vérité, de montrer à tout le monde le vrai visage du gouvernement et ne nous informer sur tout. »

« Ce qui m’a frappé dans ce témoignage sont les années de prison subies par monsieur ALZEITANI, les maltraitances dont il a été victime. Une de ces phrases m’a énormément touchée est : « Je suis seul sans ma femme ». »

« J’aimerais dire au journaliste en exil, vous avez eu du courage et on vous doit tout notre respect. »

 

Pour préparer cette rencontre, les professeurs ont demandé aux élèves de réaliser des présentations par groupe. Voici quelques-unes de ces présentations :

Présentation du groupe 1 : La Syrie, son histoire et sa politique

Présentation du groupe 5 : La liberté d’expression dans le monde

Présentation du groupe 6 : La Maison des journalistes

 

Revue de presse :

La Provence, « Un « renvoyé spécial » témoigne au lycée Dumas » par Jean-Luc PARPALLEIX, publié le 14 février

Vaucluse Matin, « Education. Rencontre avec le journaliste Hani Alzeitani au lycée Alexandre Dumas » par Annie LELLOUCH, publié le 17 février

Lycée professionnel Cavaillon, « Renvoyé Spécial : bilan de la rencontre » par Stéphane LANGLOIS (élève du lycée), publié le 22 février

 

Vidéo réalisée par les élèves :

 

Les 14, 15, 16 et 17 mars 2018 auront lieu pour la onzième édition les Assises Internationales du Journalisme et de l’Information de Tours. A cette occasion, la MDJ sera présente pour participer aux débats sur les conditions de production d’une information de qualité aujourd’hui en France. Alberic DE GOUVILLE, vice-président de la MDJ, modérera la rencontre avec deux journalistes membres de l’association : Abdessamad AIT AICHA du Maroc et de Mandian SIDIBE de Guinée, ainsi que Darline COTHIERE, directrice de l’association. Rendez-vous le jeudi 16 mars de 11 heures au Centre International de Congres Vinci de Tours.

A suivre, sur la même journée, Elyse NGABIRE, journaliste burundaise ex résidente de MDJ, interviendra à la grande soirée des Assises, « Médias et migrants ». 

Cette année, c’est le journaliste Thomas SOTTO qui présidera le jury des Assises internationales du journalisme, chargé de remettre plusieurs prix dont le prix du « Enquête et reportage ». Ce prix a été remporté par le journaliste de la MDJ, Karam AL-MASRI lors de l’édition 2017 pour son reportage à Alep sous les bombes pour l’ Agence France Presse (AFP) Couvrir Alep, la peur au ventre et le ventre vide avec la journaliste Rana Moussaoui.

(Re)découvrir le travail de Karam AL-MASRI ET Rana MOUSSAOUI en photos, textes et vidéos

 

Retour en images sur les moments forts de l’édition 2018

Revue de presse

« Attendez, je vais ouvrir la fenêtre, ça sent trop la cigarette, désolé ». Hicham, trentenaire aux fines lunettes, originaire du Maroc, nous accueille dans sa chambre, un soir d’automne, au deuxième étage de la Maison des journalistes. Un lit, une penderie, un petit bureau avec un PC et une pile de journaux.

L’article en entier : La chronique d’Amnesty International n°375, France | Quartier Libre : Une maison accueille à Paris des journalistes fuyant leur pays, publié en février 2018 par Lucas Chedeville