La Maison des journalistes (MDJ) est une association loi 1901, située à Paris qui a pour mission d’accueillir et d’accompagner des journalistes contraints de fuir leur pays pour avoir voulu pratiquer une information libre. Depuis 2002, ils sont plus de 300 venus de 60 pays à avoir été accueillis, soutenus et accompagnés par la MDJ. Il s’agit d’un lieu de résidence provisoire pour ces exilés, professionnels de l’information, un endroit pour se reconstruire. Dans cette maison refuge, le résident côtoie des femmes et des hommes dont les origines, la langue, les opinions politiques et religieuses sont différentes, mais tous, au-delà de leurs pratiques parfois très diverses du métier, ont l’expérience commune des répressions et de l’exil.
L’autre mission de la MDJ, est de sensibiliser les jeunes générations à la défense des libertés, en particulier d’expression. Nos journalistes se rendent partout en France- notamment, dans des lycées, des universités – pour témoigner de leur parcours et éduquer au respect des valeurs fondamentales et citoyennes.
La MDJ est principalement soutenue par des médias français, la Ville de Paris, le Fonds européens et différents mécènes et partenaires internationaux.
La parole à Rana ZEID, journaliste syro-palestinienne ex résidente de la MDJ
Ce n’est pas facile d’être une personne exilée : au bas mot, il s’agit d’un malheur ! Cependant, aujourd’hui, je me réjouis lorsque je me lance dans des discussions avec un confrère journaliste chez moi, à la Maison des Journalistes à Paris. Je discute avec Enayet, qui vient du Bangladesh. Nous parlons en utilisant des phrases dans lesquelles s’entrecoupent l’anglais et le français. Je m’aide des nombres, des noms de lieux, de ceux des organisations qui nous aident à obtenir l’asile. Ainsi, je me rassure au sujet de la situation d’Enayet, je parle avec lui et je le complimente sur sa cuisine asiatique, qui contient les épices de l’Orient. Grâce aux discussions, j’oublie ma profonde douleur, la blessure de l’exil et les nouvelles annonçant la mort qui arrivent quotidiennement de Syrie. Ici, dans cette maison, dans la Maison des Journalistes, il y a des écrivains, des photographes, des journalistes-réalisateurs qui ont fui les dictatures du monde, leur répression et leur terreur. Nous, nous sommes Africains, Iraniens, Tibétains, Tunisiens, Libyens, Syriens et Afghans… Nous avons aboli les différences entre nous, afin de nous rassembler en ce lieu, suivant une vision humaniste et une valeur élevée : la liberté. Nous sommes les journalistes exilés, les réfugiés en France, terre des Lumières, des cultures qui se mêlent. Chaque jour, nous regardons en direction du soleil, espérant un futur meilleur pour nos pays, où nous retournerons un jour peut-être. La Maison des Journalistes à Paris est avant tout un lieu humaniste. S’il y a des distinctions entre les capacités des journalistes, ce sont les terribles circonstances qui ont réuni la majorité d’entre nous, ici, dans quatorze chambres qui se juxtaposent au sein du bâtiment principal, près d’un joli petit cimetière parisien regorgeant d’anges. Chacun doit bien méditer sur sa vie ; sur sa mort aussi, avant que celle-ci n’advienne, afin que se réalise son humanité ! Notre patrie d’origine était contre nous. Elle nous a tués et voulait alors que nous ne soyons que des corps ou des poupées silencieuses et muettes. Je suis Syrienne et Palestinienne, vivant dans ce lieu parisien qui palpite de vie. Je ne suis pas seulement une personne qui a écrit pour la presse. Je suis un être humain qui cherche une patrie de substitution. Je combats les ténèbres, les ténèbres de la pensée et je lutte afin d’étreindre la captivante liberté.